Tribune : « Les responsables d’Orpea doivent s’expliquer devant les représentants de la nation »

J’ai signé avec 70 députés, des représentants associatifs et syndicaux, une tribune à l’initiative des députés socialistes et apparentés, pour appeler à l’ouverture d’une commission d’enquête parlementaire à l’Assemblée nationale visant à tirer au clair les informations et révélations sur les pratiques dans les Ehpad de ce groupe privé à but lucratif.

 

Tribune. Toutes et tous, nous avons été profondément choqués par les révélations du livre Les Fossoyeurs [Fayard, 400 pages, 22,90 euros] de Victor Castanet. Loin de révéler des actes de maltraitance isolés, son auteur dénonce l’existence au sein du groupe Orpea d’un système industrialisé de réduction des coûts. Un tel système, s’il était avéré, impliquerait des conséquences directes sur la qualité de la prise en charge de dizaines de milliers de personnes âgées ainsi que sur les conditions de travail de milliers de collaborateurs du groupe.

Un certain nombre de pratiques dénoncées dans cet ouvrage nous interrogent : le groupe Orpea a-t-il effectivement mis en place un rationnement des produits de santé, notamment des protections, avec les impacts sur la dignité et la santé des personnes âgées qui y sont dévoilés ? A-t-il rationné les produits d’alimentation en imposant à ses résidences un coût de repas d’environ 4 euros par jour et par personne, soit à peine plus d’un euro par repas ? A-t-il eu, comme le rapporte l’auteur, une gestion pour le moins critiquable de l’argent public qui lui était alloué chaque année par les agences régionales de santé et les conseils départementaux ?

Les accusations contenues dans cet ouvrage sont graves. Elles s’appuient sur les témoignages de plus de 250 personnes dont un nombre conséquent d’anciens salariés du groupe Orpea et de multiples documents. Face à ces accusations, toute la lumière doit être faite.

Plus largement, un débat public doit s’ouvrir sur la question complexe de la prise en charge de la dépendance de nos aînés, de son financement et de ses métiers durs.

Seule une commission d’enquête parlementaire permettrait d’auditionner immédiatement et sous serment les dirigeants du groupe Orpea, faisant dès lors peser une responsabilité pénale sur leurs propos, et de se faire communiquer tout document qu’elle jugerait utile. De telles garanties interdiraient les réponses floues et imprécises qui ont été apportées par ces mêmes dirigeants lors de l’audition à l’Assemblée nationale le 2 février.

Un devoir envers les résidents
Cette commission d’enquête parlementaire nous paraît dès lors absolument nécessaire. Nous demandons solennellement ici de la créer !

Le lancement de cette commission d’enquête parlementaire à l’Assemblée nationale ne serait pas contradictoire avec celle que le Sénat vient d’annoncer, dont le périmètre concerne la politique de contrôles des Ehpad et non les pratiques du groupe Orpea.

Elle ne serait pas non plus contradictoire avec la suspension des travaux à l’Assemblée nationale à la fin du mois de février : une commission d’enquête parlementaire a toute latitude pour se réunir en dehors des sessions parlementaires.

Rien ne fait donc obstacle à la création de cette commission d’enquête parlementaire. Au contraire, elle est d’une impérieuse nécessité. Dans notre histoire récente, tous les scandales sanitaires, de la crise de la « vache folle », en 2001, à la gestion de la campagne de vaccination contre la grippe A (H1N1), en 2010, en passant par celle de la canicule, en 2003, ont débouché sur une commission d’enquête parlementaire.

Sans attendre, la nation, par l’intermédiaire de ses représentants, doit interroger les dirigeants du groupe Orpea. Sans attendre, la nation doit comprendre comment ce groupe a géré son argent, de l’argent public. Sans attendre, si les pratiques dénoncées sont avérées, la nation doit entendre son administration pour comprendre comment elles ont pu se produire.

Pour établir les faits et déterminer les réformes à mener afin de prévenir tout futur scandale, il est urgent que l’Assemblée nationale crée une commission d’enquête parlementaire sur l’affaire Orpea !

Nous le devons aux résidents, aux familles, et à tous les personnels de ces Ehpad.

 

 

Liste complète des signataires :

Députés

Joël Aviragnet (groupe « Socialistes et apparentés”), Clémentine Autain (groupe «La France insoumise”), Marie-Noëlle Battistel (groupe “Socialistes et apparentés”), Ugo Bernalicis (groupe “La France insoumise”), Gisèle Biémouret (groupe “Socialistes et apparentés”), Jean-Louis Bricout (groupe “Socialistes et apparentés”), Moetai Brotherson (groupe “Gauche démocrate et républicaine”), Alain Bruneel (groupe “Gauche démocrate et républicaine”), Marie-George Buffet (groupe “Gauche démocrate et républicaine”),  Annie Chapelier (groupe “Agir ensemble”), André Chassaigne (Président du groupe “Gauche démocrate et républicaine”), Paul Christophe (groupe “Agir ensemble”), Éric Coquerel (groupe “La France insoumise”), Alexis Corbière (groupe “La France insoumise”), Alain David (groupe “Socialistes et apparentés”), Yolaine de Courson (groupe “Mouvement Démocrate et apparentés”), Pierre Dharréville (groupe “Gauche démocrate etrépublicaine”), Jeanine Dubié (groupe “Libertés et Territoires”), Jean-Paul Dufrègne (groupe “Gauche démocrate et républicaine”), Laurence Dumont (groupe “Socialistes et apparentés”), Elsa Faucillon (groupe “Gauche démocrate et républicaine”), Olivier Faure (groupe “Socialistes et apparentés”), Caroline Fiat (groupe “La France insoumise”), Pascale Fontenel-Personne (groupe “Mouvement Démocrate et apparentés”),  Albane Gaillot (non inscrite), Guillaume Garot (groupe “Socialistes et apparentés”), David Habib (groupe “Socialistes et apparentés”), Christian Hutin (groupe “Socialistes et apparentés”), Sandrine Josso (groupe “Mouvement Démocrate et apparentés”), Chantal Jourdan (groupe “Socialistes et apparentés”), Régis Juanico (groupe “Socialistes et apparentés”), Sébastien Jumel (groupe “Gauche démocrate et républicaine”), Marietta Karamanli (groupe “Socialistes et apparentés”), Manuéla Kéclard-Mondésir (groupe “Gauche démocrate et républicaine”), Bastien Lachaud (groupe “La France insoumise”), Michel Larive (groupe “La France insoumise”), Karine Lebon (groupe “Gauche démocrate et républicaine”), Jean-Paul Lecoq (groupe “Gauche démocrate et républicaine”), Gérard Leseul (groupe “Socialistes et apparentés”), Josette Manin (groupe “Socialistes et apparentés”) Jean-Luc Mélenchon (groupe “La France insoumise”), Philippe Naillet (groupe “Socialistes et apparentés”), Jean-Philippe Nilor (groupe “Gauche démocrate et républicaine”), Danièle Obono (groupe “La France insoumise”), Mathilde Panot (Présidente du groupe “La France insoumise”), Valérie Petit (groupe “Agir ensemble”), Stéphane Peu (groupe “Gauche démocrate et républicaine”), Christine Pirès-Beaune (groupe “Socialistes et apparentés”), Dominique Potier (groupe “Socialistes et apparentés”), Loïc Prud’homme (groupe “La France insoumise”), Adrien Quatennens (groupe “La France insoumise”), Valérie Rabault (Présidente du groupe “Socialistes et apparentés”), Muriel Ressiguier (groupe “La France insoumise”), Claudia Rouaux (groupe “Socialistes et apparentés”), Jean-Hugues Ratenon (groupe “La France insoumise”), Fabien Roussel (groupe “Gauche démocrate et républicaine”), Sabine Rubin (groupe “La France insoumise”), François Ruffin (groupe “La France insoumise”), Isabelle Santiago (groupe “Socialistes et apparentés”), Hervé Saulignac (groupe “Socialistes et apparentés”), Bénédicte Taurine (groupe “La France insoumise”), Sylvie Tolmont (groupe “Socialistes et apparentés”), Cécile Untermaier (groupe “Socialistes et apparentés”), Hélène Vainqueur-Christophe (groupe “Socialistes et apparentés”), Isabelle Valentin (groupe “Les Républicains”), Boris Vallaud (groupe “Socialistes et apparentés”), Michèle Victory (groupe “Socialistes et apparentés”), Annie Vidal (groupe “La République en Marche”), Stéphane Viry (groupe “Les Républicains”), et Hubert Wulfranc (groupe “Gauche démocrate et républicaine”).

Représentants des organisations syndicales

Laurent Berger (Secrétaire général de la CFDT), Philippe Martinez (Secrétaire général de la CGT), et Yves Veyrier (Secrétaire général de Force Ouvrière), Françoise Geng, (vice-présidente de la Fédération syndicale Européenne des Services Publics).

Représentants des collectifs de familles et de personnels

Patrick Collardot, association TouchePasMesVieux,  Annie Rousseau, Collectif EHPAD Familles 42, Philippe Prince-Demartini, association FAVICOVID, Sara Piazza, collectif  Vital, Julie Grasset, collectif Cœur Vide 19, Jocelyne Huard De La Marre, collectif Aidons nos Aînés, Laurent Frémont, collectif Tenir ta main, Jean-Louis Genest, collectif Nos Proches en EHPAD, Franche Comté, Mme Joëlle Bertrand, collectif Transparence, Martine Bismuth, collectif Les Lilas (Ehpad “les terrasses des Lilas” du groupe Orpéa), Laurent Garcia, association Observatoire du Grand Âge, Maître Fabien Arakelian, avocat de familles de pensionnaires Orpéa, Maître Sylvia Lasfargeas, avocate d’anciens salariés Orpéa et Sylvie et Thomas Mitsinkides, fille et petit-fils de Françoise Dorin.